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Alberto García-Alix intime

 

© Alberto García-Alix, Un homme triste, autoportrait, 2001
© Alberto García-Alix, Autoportrait à Budapest, 2000
© Alberto García-Alix, Autoportrait avec mocassins, 1988

 

 

À Barcelone, le Palais de la Virreina propose Autorretrato (Autoportrait) – Alberto García-Alix. Où le photographe espagnol donne à voir l’intime à travers une série d’autoportraits. 
Une manière de dire sa vie à travers sa propre image, mais aussi les lieux et objets qui dessinent son parcours. Une autobiographie poétique où la pudeur n’est pas exclue.

De l’intimité sans extravagances, Alberto García-Alix se définit comme une personne timide. Ses autoportraits ne sont pas dans l’air du temps où se photographier est synonyme d’un désir de paraître autrement, de se réinventer. D’éviter le dévoilement de soi, la vraie nudité. Où l’être s’efface au profit de l’apparence. Le photographe est à contre-courant car il choisit, depuis la fin des années 70, de montrer qui il est en tant que personne avec toute sa part d’intime. Une manière d’autobiographie photographique. Se représenter qui il est, comment se déroule son existence, son quotidien, son entourage, les objets, les chambres, les appartements… “J’ai commencé à faire des autoportraits par jeu, j’ai pris ma caméra et je me suis balancé vers la gauche, vers la droite, pour voir ce que cela donnerait sur une photo”, raconte le photographe lors de la présentation de l’exposition barcelonaise. Un “jeu” pour contrer peut-être el miedo, la peur, car il ne cache pas non plus qu’il est un grand angoissé et le raconte dans un texte qu’il a écrit sur ce thème (Escondido en mi miedo – Caché dans ma peur) :  “La peur nous accompagne tous, tout au long de notre vie.”

“Je n’ai pas photographié la Movida… je l’ai vécue.”

Celui que l’on classe souvent comme LE photographe de la Movida madrilène réfute cette étiquette : “Je faisais simplement des photos de mon propre entourage… Je n’ai pas photographié la Movida, je l’ai vécue, en sortant dans les bars, en m’amusant. D’autres comme Miguel Trillo, eux, peuvent être considérés comme tel. J’aurais aimé avoir plus conscience de ce que vivait l’Espagne à ce moment- là.”  Au fil des 76 images et des deux films présentés ici, nous sommes invités à parcourir l’histoire d’un homme. Sa passion pour la moto, son petit air canaille (Autoportrait avec moto, 1978), ou une photo de dos, cheveux gominés et perfecto comme une citation d’Elvis (Autoportrait de dos, 1978). Plus loin, il percute le regard… nu et solitaire devant une piscine où il vient de se baigner. Une piscine comme un réceptacle du passé, le cliché est légendé Un homme triste (2001). La vérité d’une vie. Les seringues, les amis perdus, les amours mortes et les secrets chuchotés dans le jardin d’un immeuble… Les autoportraits d’Alberto García-Alix nous parlent d’amour, il s’agit bien de cela. Surtout.

Noir et blanc

Se mettre à nu, se dévoiler totalement mais avec pudeur toujours, le noir et blanc est là pour une certaine distance. Depuis le début de sa carrière, le photographe utilise ces deux seules couleurs intransigeantes qui font et défont les ombres, le passé, le présent. Voir une fenêtre ouverte sur une cour, et cette photo sublime titrée En attendant Pam (2000), c’est voir une poésie échappant à toute mièvrerie, à tout objet superflu. Seul le sentiment, la sensation de l’attente sont dévoilés. Son bras tatoué et ses mains qui tiennent à bout de doigt un préservatif usagé prêt à être jeté… comme la fin d’une histoire (Une petite histoire d’amour, 1995). On regarde encore, parcourant les vastes salles du Palais de la Virreinaon tourne une nouvelle page de l’autobiographie del señor. Les enveloppes décachetées, des lettres où une femme a dessiné et écrit pour lui les mots des sentiments (Les lettres de Montse, 1987). Et puis, une image troublante où le photographe, couché sur des draps blancs froissés, montre une petite moitié de son torse, nu et presque glabre. Une main tendue posée sur la jambe d’une femme dénudée allongée à ses côtés et dont nous ne voyons pas le visage, il est écrit  Autoportrait avec la femme que j’aime (1984). Une autobiographie où l’intimité est un secret révélé avec une grande maîtrise, un objet délicat raconté en noir et blanc. 

© Corinne Bernard, février 2013.

Autorretrato/Autoportrait, Alberto García-Alix, exposition visible du 7 février au 5 mai 2013, au Palau de la Virreina – Centre de la Imatge, La Rambla, 99, Barcelone. Du mardi au dimanche, de 12 h à 20 h. Entrée libre.

Catalogue d’exposition : Alberto García-Alix, Autoretrat/Self-Portrait (comporte le texte Escondido en mi miedo), éditions La Fabrica. 

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